Moralisation et premiers traités

La moralisation du jeu par l’église et les premiers traités

 

Quand le jeu se développe en Europe, les dés sont fréquemment associés au jeu, apportant une part de hasard au mouvement des pièces. Les parties sont également l’objet de paris.

Le clergé tentera d’y mettre bon ordre.

Un des premiers documents concernant cette moralisation est une lettre(en latin) datant de 1061 du cardinal Petrus Damiani au pape Alexandre II pour se plaindre du succès grandissant des échecs et de l’indulgence à leur égard de l’évêque de Florence.

Le roi Saint Louis avait parait-il horreur des échecs. À la tête de la septième croisade vers la Terre sainte, il n’hésite pas à jeter par-dessus bord l’échiquier avec lequel jouaient ses frères.

Le manuscrit Quaedam moralitas de scaccario (vers 1260), est une des plus anciennes “moralités” sur les échecs écrite au Moyen Âge. Plusieurs manuscrits existent attribués soit au Pape Innocent III (1163-1216) soit à “Johannes Gallensis”, un moine franciscain d’origine galloise ayant vécu dans les années 1260-1280. Le plus ancien manuscrit conservé date du début du XIVe siècle.

Le Bonus Socius (vers 1275) est un très important traité en latin regroupant de nombreux problèmes d’échecs, un certain nombre étant d’origine arabe. Le titre provient du surnom que se donnait l’auteur anonyme, bonus socius signifiant le bon compagnon, titre donné dans le milieu des enseignants d’université de l’époque. L’origine est attribuée à un lombard : Nicolas de Nicolaï. Le Bonus Socius connut un très grand succès et fut plusieurs fois recopié (avec quelques modifications et ajouts) et traduit.

 

 

Manuscrit ayant appartenu à Charles V : copie (XIVème siècle) du recueil de Nicolas de Nicolaï.

 

 

Traduction du traité de Nicolas de Nicolaï , « le gieu des eskies », manuscrit copié et peint à Paris au début du 14ème siècle (BNF). Ce recueil propose 348 études de fins de partie, rigoureusement décrites et commentées.

Le roi d’Espagne Alphonse X (1221 – 1284), écrivain et poète, contribue à la diffusion du jeu en ordonnant la rédaction d’un traité sur plusieurs jeux dont le jeu d’échecs. Achevé en 1283, il décrit les règles du jeu, expose plusieurs problèmes ainsi que plusieurs variantes du jeu.

 

 

Traité d’Alphonse X (1283)

 

Le moine italien Jacques de Cessoles écrit entre 1259 et 1273 Le Liber de moribus hominum et officiis nobilium (Le Livre des moeurs des hommes et des devoirs des nobles ou Livre des échecs,la traduction française a été : le jeu des échecs moralisé).

Cet ouvrage a une importance considérable. Il va être recopié ou re-imprimé pendant plusieurs siècles et traduit en plusieurs langues. Chaque pièce est identifiée à un métier ce qui permet à l’auteur de dresser un présentation idéale de la société. Il est orné de très belles miniatures. Cela explique son incroyable succès auprès des princes et des riches d’alors.

 

 

Miniature de l’ouvrage de Jacques de Cessoles

Voici la dernière phrase d’une traduction française de ce manuscrit (moralité des nobles hommes et des gens du pueple sus le gieu des eschés) par Jehan de Vignay, entre 1335 et 1350, dédicacé à jean II le bon (avant qu’il ne soit roi) :

… Et pour ce, chier seigneur, depri je le roy de qui toute grace et toute vertuz vient que il vous doint si a vous et a nous demener nostre vie en ce siecle que ce soit a la gloire du roy de paradis et de toute le glorieuse compaignie des ciex et a l’onneur des corps et au proffit des ames. Amen. Ci fenist le livre de la moralité des nobles hommes et des gens du pueple sus le gieu des eschés translaté de latin en françois par frere Jehan de Vignay, hospitalier.

 

 

Le jeu d’or de Maitre Ingold (1432)

 

Le jeu d’or de Maitre ingold est issu d’une série de sermons prononcés par ce dominicain strasbourgois vers 1432 et mettant en relation sept péchés capitaux et sept jeux dont les échecs. Les échecs sont associés à la vaine gloire. L’influence de jacques de Cessoles y est patente.